87.Un écho de la vie local : l'atelier Laine de Marc Decker à Gerde

La vie ici, les gens d’ici, ici la laine

 

Un atelier de feutrage de la laine totalement différent… Local, familial, partagé…

 

 

La laine est une ressource isotherme qui n'est plus achetée aux éleveurs locaux ; de plus, elle est interdite de décharge publique. Ce gaspillage a troublé un habitant de Gerde qui a entrepris une démarche de revalorisation de la laine fournie par les races locales sur un territoire des Pyrénées historiquement réputé pour son travail de la laine.

Cet habitant est en réalité l'ancien maire de Gerde, M. Marc Decker, qui avait obtenu une distinction et des crédits pour un projet écologique sur sa commune mais qui n'a pas été compris et suivi par ses collaborateurs municipaux malgré la reconnaissance financière nationale de son projet.

Il s'est consacré à son projet concernant la laine, démarré d'abord par une Association HALTE LAAA qui avait commercialisé des chaussettes de laine pour en  démontrer une possibilité. Cela a été repris par un artisan local de la vallée d'Aure.

Puis, Marc Decker a continué sa démarche a évolué vers la création d'un atelier de feutrage capable d’apporter d'autres débouchés pour la laine. Je l’ai rencontré et visité son atelier, à Gerde.

 

 

Le projet démarre il y a plus de 10 ans

 

Dès 2011 Marc Decker organise des Rencontres Professionnelles Transfrontalières sur le thème

«  Laines des Pyrénées », à Bagnères-de-Bigorre. Cela dans la continuité de son projet associatif « HALTE LAAA » entre autres projets innovants et écologiques menés sur la commune de Gerde.

 

Lors des journées de rencontre de Novembre 2011 il proposait de créer une filière laine dans le Massif des Pyrénées  et l’affiche invitait « les producteurs de laine, éleveurs ou associations, les transformateurs de laines, entreprises ou artisans, les créateurs textiles, les fermes pédagogiques, les animateurs, les organismes de développement de projets, les élus, etc., pour débattre des possibilités de valoriser les laines des races ovines dans des fabrications traditionnelles de qualité avec la participation des artisans et petites entreprises locales qui subsistaient et accepteraient de transmettre leur savoir-faire. Sachant que des jeunes et de nouveaux arrivants dans la région pyrénéenne manifestaient un intérêt pour la valorisation de cette ressource naturelle et renouvelable. Les projets pouvant s’étendre entre l’Espagne et la France, entre l’Est et l’Ouest du Massif »

 

Nul n’est prophète en son pays ?

 

Peu compris de ses contemporains comme le sont souvent les pionniers inventifs, après avoir quitté son mandat de maire de Gerde,  il se concentre maintenant sur un projet plus personnel de recherche et d’expérimentation des diverses possibilités de valoriser toutes les qualités de laine locales.

 

Son atelier, unique en son genre en France, et totalement innovant, est aussi un atelier partagé, partagé avec des complices, des artisans et artistes locaux prêt à utiliser et exploiter toutes les ressources du feutre de laine.

 

Des fonds provenant d’une souscription

 

L’atelier partagé de feutrage de laine à Gerde dans une annexe de la maison personnelle de Marc Decker a été mis en place et équipé de machines grâce à une souscription.

 

Dans ce lieu de recherche, pas de vente d’objets mais une transmission de savoir, des partages d’idées sur les meilleurs façons de valoriser et d’encourager l’utilisation du feutre de laine avec des curieux, des créateurs, des artisans ou des éleveurs.

 

Les laines des races locales comme la Lourdaise ou l’Auroise qui y sont travaillées n’ont pas besoin d’avoir des propriétés favorables au filage, c’est toutes leurs autres propriétés et en particulier leur pouvoir isolant qui sont recherchées.

 

La laine locale ne reçoit pas un accueil favorable localement

 

Marc Decker commente : "La laine locale méprisée, rejetée a de multiples propriétés dont un pouvoir isolant. Ici on montre l’étendue des possibilités de cette matière première très abordable du point de vue financier. On importe de Chine des produits bon marchés mais de qualité douteuse fabriqués dans des conditions déplorables. J’achète à petit prix ou on me donne la laine brute de la tonte. Je la lave dans de l’eau de source ou de pluie et la fait tremper dans une soupe aux ingrédients secrets puis je la fais sécher."

 

Cette première étape de nettoyage prend plusieurs jours. D’autres étapes vont suivre plus ou moins longues, plus ou moins délicates ou techniques à mettre en œuvre qui nécessitent des outils ou des machines pour que les fibres de laine se croisent et forment enfin du feutre qui sera ensuite habillé ou non de tissu selon l’usage qui en sera fait. Madame Decker participe à la couture des tissus.

 

L’apport de la technologie

 

Grâce à quelques outils et machines Marc Decker peut faire à lui seul ce qui nécessitait plus de main d’œuvre de la part des ancêtres qui pratiquaient cette activité.

 

La création d’une pièce de feutre est tout un processus que Marc Decker maîtrise et peut transmettre.

 

Vers une « Cité de la laine » à Lourdes

 

C’est à Lourdes qu’il vient de trouver un élu vraiment intéressé par son projet en la personne du maire. Celui-ci a fait voté son conseil municipal, Lourdes : « Cité de la Laine ».

 

Avec l’icône de Lourdes, Bernadette Soubirous, bergère, le lien entre Lourdes et laine est naturel.

 

Cet élu est prêt à s’investir dans le projet de création et de vente d’objets en feutre de laine. La marque « Bergère de Lourdes » est déjà déposée pour cette nouvelle collaboration entre l’atelier de Gerde et la cité mariale.

 

Invitation au voyage …à Gerde !

 

Marc Decker invite dans son atelier tout créateur de chapeaux, sacs, tapis de travail ou de yoga, coussins et autres objets, utiles ou décoratifs, pouvant être fabriqués en feutre de laine des Pyrénées. Ceux-ci emporteront leurs créations car ce sont surtout la transmission et le partage dans une ambiance chaleureuse qui importent pour lui.

 

Ils auront aussi l ‘occasion de l’écouter et de voyager en imagination dans les Pyrénées et les traditions ancestrales racontées par ce passionné qui s’appuie sur le passé pour aller vers l’avenir, un avenir plus écologique et plus humain.

 

Un espace original et accueillant à nul autre pareil

 

Dans l’atelier de feutrage, surtout à l’étage où l’on accède par un escalier extérieur, j’ai été impressionnée par le lieu. Un espace entourée de laine brute et de laine travaillée, paisible et plein de douceur, une sorte de cocon de laine. J’ai eu l’impression d’entrer dans un lieu de recueillement, un espace où je pourrais me recentrer sur l’essentiel et rassembler mes forces.

Ceux qui ont le souvenir du calme d’une bergerie à l’heure où le troupeau couché rumine paisiblement loin des cris et des fureurs du monde me comprendront mieux.

 

Cet atelier est bien un lieu à part... des bruits discordants du monde actuel. Marc Decker y reçoit pour une journée quiconque désire y travailler la laine. Je ne doute pas qu’une journée avec lui, dans son atelier, en dehors d’un apprentissage possible, puisse devenir aussi un intermède de ressourcement voire de guérison.