07 février 2021

35. Les manipulations par les chiffres - Antoine Houlou-Garcia et Thierry Maugenest

 

«Le Théorème d’Hypocrite»


 Une histoire de la manipulation par les chiffres de Pythagore au Covid-19


Antoine Houlou-Garcia[1] et Thierry Maugenest[2]

chez Albin Michel, 2020

 

 

Les auteurs montrent que «le mensonge le plus pernicieux est le mensonge mathématique» et qu’il ne date pas d’hier.

 

 

De Montesquieu à Mark Twain

 

Montesquieu relevait les absurdités de certains calculs et prédisait notre monde actuel dans lequel le calcul remplace le penser tandis que Diderot critiquait les liens «délétères qui unissent politique et mathématiques». Pour Mark Twain il existe «trois sortes de mensonges: les mensonges, les gros mensonges et les statistiques». Bien d’autres citations encore, de personnages connus de l’histoire, vont dans le même sens.

 

L’apparente impartialité des chiffres et des calculs cache toutes sortes de manipulations décrites par les auteurs de cet ouvrage: choix subjectif du mode de calcul, addition ou multiplication d‘objets hétéroclites, confondre corrélation et causalité, modéliser à partir de données erronées, confondre risques relatif et absolu, etc. Bien d’autres manipulations sont décryptées dans les domaines les plus divers au long des 330 pages[3].

 

Les chiffres sont neutres, mais pas ceux qui les utilisent

 

Les chiffres sont neutres mais pas les mathématiciens ni leurs commanditaires qui utilisent les méthodes de calcul, qui les arrangent et interprètent les résultats chiffrés en fonction d’intérêts ou d’une idéologie.

 

Mensonges d’autant plus «pernicieux» que la foi en l’autorité scientifique ou l’ignorance de cette gymnastique intellectuelle empêche toute remise en cause et permet aux mathématiques de servir d’«alibi à l’injustifiable». (Voir paragraphes sur l’eugénisme)

 

Un monde de quantification à outrance

 

Ainsi notre monde actuel où la quantification règne en maîtresse presque absolue «ressemble de plus en plus à celui de Machiavel» selon Bertrand Russel («Histoire de la philosophie occidentale», 2017)

 

Une ancienne analyste à Wall Street, Cathy O’Neil[4], compare les algorithmes, qui régentent maintenant les politiques à «des armes de destruction massives».

 

Sur la modélisation mathématique si à l'ordre du jour

 

«Les modèles mathématiques[5]... froids et impersonnels ...sont  déshumanisants». Et l’homme moyen des statistiques, «recherché par les politiques et les journalistes» n’existe pas. «Produit des équations» l’homme moyen n’a aucune réalité.

 

«Les politiques publiques pour l’homme moyen», irréel, «accentuent les discriminations et les inégalités sociales»: divers exemples sont donnés dans des secteurs différents car ces manipulations de chiffres et les indices statistiques impactent la politique, la justice, les finances, l’économie en général, la santé, la culture.

 

Des exemples pris dans la vie de tous les jours 


Des indices statistiques, par exemple, sont attribués en fonction des lieux d’habitation des individus. Ceux-ci obtiendront ou non un prêt bancaire ou bien seront  jugés et condamnés en partie en fonction de cet indice qui va influencer les décisions du banquier ou du juge, et ce, sans rapport avec la solvabilité réelle du demandeur ou la gravité réelle du délit commis. 

 

Les calculs remplacent les jugements réfléchis dans la plupart des secteurs de notre vie, y compris dans la santé où des protocoles uniformisés remplace  diagnostics et traitements personnalisés.

 

Et l'industrie pharmaceutique ?

 

Diverses manipulations opérées par l’industrie pharmaceutique, qui est coutumière d’études biaisées  et mensongères[6], sont décrites. A titre d’exemple, la corrélation est l’observation de phénomènes se produisant dans les mêmes temps: en été le nombre de coup de soleil et la vente de glaces augmentent sans relation de cause à effet entre ces 2 faits.

 

Dans des études biaisées l’excès de cholestérol a été interprété comme la cause d’accidents cardiovasculaires alors qu’en réalité des études plus complètes et plus rigoureuses ont montré que ce sont des faits concomitants résultant d’autres facteurs, dont la «malbouffe»

 

Ces premières études mensongères puis le fait de baisser arbitrairement le seuil de risque du cholestérol de 3 à 1,6 gr. a permis de mettre la moitié des américains des USA sous traitement anti cholestérol

 

Et d’entretenir ainsi  un énorme cheptel de malades par des traitements anti-cholestérol ayant des effets secondaires néfastes. De plus comme le cholestérol n’est pas la cause des problèmes cardio-vasculaires, son traitement ne pénalise pas non plus le marché de la chirurgie cardiaque.

 

Parlons de la crise dite sanitaire 

 

La crise sanitaire de 2020 repose en grande partie sur une «agitation de chiffres» et une quantification abusive de la létalité d’un virus. La différence de mortalité, par la covid-19 en 2020, entre les pays, par exemple entre la France et l’Allemagne, repose essentiellement sur des calculs différents : les données prises en compte ne sont pas les mêmes.

 

Les gouvernants, les banques, les assureurs, les laboratoires pharmaceutiques et d’autres encore chiffrent «à l’envi leurs rapports afin d’en dissimuler certaines vérités». «Les mathématiques se révèlent délétères lorsqu’on leur accorde une confiance aveugle et qu’elles finissent par occuper la totalité du champs politique…. De science, la mathématique politique est devenue un dogme »

 

Ce livre, documenté et argumenté, est «un réquisitoire contre le règne despotique de la pensée calculante» qui déshumanise tous les domaines de notre société.

 

L’épidémie de 2020 en France a fait moins de morts que l’épidémie de grippe de 2017 si ont s’en tient aux statistiques du très officiel INSEE et ses courbes publiées[7]. L’épidémie grippale de 2017 est passée inaperçue dans le grand  public, sans renommée médiatique et sans conséquence économique.

 

Des philosophes et des initiés tels que Pythagore, Platon, Steiner, ont prôné l’exercice des mathématiques pour développer une pensée «pure» libérée des sens.

 

Dès l’Antiquité des penseurs encourageaient à «l’observation mathématique... à une appréhension idéelle libérée du  monde sensible» Cette démarche pour «s’affranchir de sa nature sensorielle et réfléchir à d’autres qualités du monde», constituait pour eux «le premier degré de l’éducation spirituelle» (Rudolf Steiner : «Philosophie et Anthroposophie»)


Mais, en définitive, où tout cela nous mène-t-il... ?


L’utilisation actuelle abusive et despotique des mathématiques est une contre-image, une perversion de la saine discipline intellectuelle des mathématiques conseillée pour s’engager sur une voie de  connaissance.

 

Par ailleurs, la sélection actuelle des étudiants par les mathématiques apparaît néfaste au scientifique  Albert Jacquard[8] : «...les maths sont une gymnastique de l’esprit ; il est dommage de ne pas les pratiquer mais on pourrait dire la même chose de la poésie ou de la philosophie. Il est en tout cas scandaleux... de sélectionner les «meilleurs» selon leurs capacités en maths.» (Entretien avec H. Planès, prof. de philo au lycée professionnel Louis Rascol d’Albi)

 

Mais c’est aussi l’ignorance du domaine des mathématiques qui favorise la confiance aveugle dénoncée dans «Le Théorème d’Hypocrite». Il est bon que l’apprentissage du type de pensée nécessaire à la compréhension des mathématiques fasse partie de notre culture de base pour ne pas se laisser berner par l’utilisation abusive et politique des chiffres.

 

Note :

Les auteurs de ce livre, afin d’illustrer les propos de leur ouvrage ont également publié sur YouTube une série de courtes vidéos pédagogiques qui ne manquent ni d’humour ni d’à propos...

Ces vidéos illustrent graphiquement des thèmes traités dans le livre. En voici quelques liens :

 

►“Pour lutter contre l’obésité, il faut interdire la vente des lunettes de soleil” : https://www.youtube.com/watch?v=anB9-tVbuHU (Thierry Maugenest)

 

 

 

 

 

 

 ►“Pour comprendre le théorème d’hypocrite et déjouer la manipulation politique des chiffres : https://www.youtube.com/watch?v=5ANoli1ZSGM (Antoine Houlou-Garcia)

 



[1] Antoine Houlou-Garcia, ancien statisticien à l’INSEE, doctorant à l’EHESS sur l’usage des mathématiques en théorie politique, chargé de cours à l’université de TRENTE, a reçu le prix Tangente de vulgarisation scientifique pour son livre «Mathématikos» et publié plusieurs essais sur les mathématiques.

[2] Thierry Maugenest, né à Moulins en 1964, est écrivain et traducteur, plusieurs prix littéraires.

[3] Les exemples actuels ne manquent pas pendant la prétendue pandémie COVID-19, à commencer par les tests PCR

[4] Cathy O’Neil, né en 1872, est une mathématicienne, « data scientist » (en termes généraux, la science des données est l'extraction de connaissance d'ensembles de données)[ et militante au sein du mouvement citoyen « Occupy Wall Street » (mouvement de contestation pacifique dénonçant les abus du capitalisme financier), d’après Wikipedia.

[5] Dont les chaînes de télévision nous abreuvent chaque jour à propos de la « pandemie »

[6] Rappelons-nous les (fausses) études publiées par le très réputé Lancet pour discréditer la chloroquine

[7] Cf. mon dernier article : « Parlons chiffres – II. La ‘surmortalité’ » (à lire éventuellement dans mon blog : https://jeannelaveilleuse.blogspot.com/

[8] Albert Jacquard, né le 23 décembre 1925 à Lyon et mort le 11 septembre 2013 à Paris, est un biologiste, généticien, ingénieur et essayiste français. (Wikipedia)

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