10 novembre 2021

66. La 'crise sanitaire' analysée par une psychologue clinicienne - Ariane Bilheran

« La crise sanitaire est un prétexte pour exercer une domination sur l’humanité »


Une vidéo de Ariane Bilheran

28 Octobre 2021

 

https://www.youtube.com/watch?v=WOC7eSeP1Q8

 

Le point de vue d’une psychologue clinicienne sur la situation politico-sanitaire française

 

Depuis 2020 s’est installé en France un régime totalitaire sous prétexte de crise sanitaire.

 

Ariane Bilheran, à partir de son expérience professionnelle décode notre situation.

 

En spécialiste de la psychologie du pouvoir, elle décrit les caractéristiques de tout totalitarisme, les profils psychologiques qui y concourent et les réactions qu’il engendre dans la population.

 

Elle nomme les processus pathologiques qui participent à l’avènement du totalitarisme et décrit brièvement les failles du développement psychologique immature des acteurs du totalitarisme.

 

Elle décrypte les mécanismes psychologiques de défense d’une grande partie de la population subjuguée, sidérée ou séduite par le régime totalitaire.

 

Elle énumère les points communs observés dans la minorité des individus résistants au régime totalitaire.

 

Sa description minutieuse des méthodes et outils du totalitarisme, ses définitions de concepts politiques et ses rappels historiques de situations analogues illustrent son explication psychologique des faits, de ce qui se passe actuellement et de ce qui risque encore d’arriver. C'est passionnant, c’est effrayant…

 

Son point de vue sur notre avenir est-il pessimiste ou simplement réaliste, l’avenir nous le dira.

 

Note explicative : dans cette vidéo Ariane Bilheran répond à des questions. Nous avons cru bon de supprimer les questions pour ne pas alourdir l’article.

 

 

 

Ariane Bilheran est diplômée de l’École normale Supérieure (Ulm), psychologue clinicienne et Docteur en psychopathologie. Spécialiste de la psychologie du pouvoir, elle a prononcé des conférences en France et à l’étranger sur les thèmes de la paranoïa, de l’emprise, du harcèlement, de la manipulation et de l’autorité. Elle a également publié de nombreux ouvrages consacrés à la littérature, la poésie, la philosophie ou la psychologie. Au cours de sa carrière, Ariane Bilheran est intervenue en tant que consultante et a dispensé des formations dans différentes entreprises ou institutions. Elle a aussi été amenée à produire des expertises judiciaires dans le cadre de procès portant sur des cas de harcèlement ou d’emprise devant les juridictions civiles et pénales. Depuis 2015, Ariane Bilheran réside en Amérique du Sud où elle poursuit son activité clinique ainsi que son travail de recherche et d’écriture, tout en consacrant une part de son temps à des actions agricoles et humanitaires. Nous l’avons rencontrée afin d’évoquer la crise sanitaire sous un autre angle, au croisement de la psychologie, de la psychopathologie et de la philosophie. Que dit cette crise de notre société ? Les mesures mises en place dans le cadre de la lutte contre l’épidémie participent-elles d’une logique totalitaire ? Comment expliquer le fait qu’une grande part de la population française se soit accommodé des différentes politiques restrictives de liberté adoptées?

 

Quelle peut-être l’issue des divisions et des fractures engendrées par les mesures prises pendant la crise sanitaire ? Quelles vertus cultiver pour retrouver le chemin de l’harmonie ? Découvrez le point de vue d’Ariane Bilheran dans cet entretien long format et donnez nous votre avis en commentaire.

 

Crédit musique : Heroic Feat by RomanSenykMusic. https://youtu.be/hvv8VLOKnsI Retrouvez les articles, ateliers et conférences d’Ariane Bilheran sur son site :

https://www.arianebilheran.com/


Depuis avril 2020, Ariane Bilheran et les bénévoles de la Fondation La Posada de Paco mènent une action caritative en Colombie afin de venir en aide aux populations locales éprouvées par les différents confinements qui ont entravé l’économie, souvent journalière et informelle. Vous pouvez soutenir l’action menée par Ariane Bilheran en Colombie ici :

https://www.gofundme.com/f/urgence-al...

 

« Je suis affolée que nous ne soyons pas tous affolés par ce qui se passe. » (A. B.)

 

Sur la capacité de discernement

 

Notre capacité de discernement est  mise à l’épreuve :

 

►1-Problème majeur de fond : comment considérons nous l’humanité, l’existence humaine ?

Peur, repli, méfiance des autres conditionné à un rejet de la maladie, puis du malade pour une existence de zéro risque : : est-ce le fait d’une existence normale, souhaitable ?

 

►2- Problème du contrôle : souhaitons-nous une société de contrôle qui abrase toutes nos libertés ? Ou une société avec des valeurs plus traditionnelles dans laquelle l’être humain reste un être libre ?

La liberté est une notion complexe qui ne consiste pas à faire tout ce qu’on veut quand on veut.

Parce qu’il faut des règles pour vivre ensemble, mais en conservant une capacité libre de penser, de s’exprimer, de se mouvoir sans enfreindre des interdits fondamentaux.

 

►3- Problème des inégalités : 2020 est caractérisée par une augmentation cruciale des inégalités, entraînant des dizaines de millions de personnes dans la précarité ou la pauvreté extrême.

Comment se préoccuper de la santé des gens et en même temps les faire basculer dans la pauvreté ?

 

Voilà quelques directions de réflexion qui concernent le pouvoir. Dès Avril 2020 j’ai écrit un article : Totalitarisme sanitaire : c’est pour ton bien, le mal radical !

 

Sur les riches et le totalitarisme

 

Le totalitarisme vise la domination totale sur les individus, sur la totalité de leur existence (sociale, professionnelle, pensée, expression, santé, etc.).

 

Nous sommes face à une déviance mondiale, face à de très très grands riches qui n’ont pas la même vision du monde, du fait de leur position sociale, que nous, gens moyens, ordinaires. Ils n’ont pas les mêmes ambitions ni les mêmes intérêts. C’est une guerre des riches, de très très riches, contre les pauvres. Ces très riches, qui ne sont pas des riches traditionnels, s’orchestrent autour d’une idéologie. Le prétexte sanitaire, d’éradication de la maladie, est destiné à exercer une domination sans égale sur l’humanité.

 

Citation d’E. BERNAYS[1] (1891/1995) auteur de Propaganda, dont la motivation était de « contrôler et d’embrigader les masses selon notre volonté et sans qu’elles en prennent conscience.»

 

Le totalitarisme est une folie collective qui présente un discours d’apparence raisonnable avec une logique argumentée. Etudions les ressources psychologiques et processus psychiques qui se mettent en œuvre au niveau de l’individu ou du collectif.

 

La dictature traditionnelle donne les pleins pouvoirs à une seule personne et c’est limité dans le temps. Souvent en cas de danger de la nation. Et ensuite la personne doit restituer les pleins pouvoirs.

 

On n’est pas dans ce cas de figure. Dans le projet de domination totale sur les individus et sur la structure de la société, qui fait participer toute la société civile autour d’une idéologie, c’est là que l’on entre dans la question de la maladie mentale.

 

Citation de L.-A. De Boubon (20/01/2019, messe à la mémoire de Louis XVI) : « Désormais il n’y avait plus de limites au pouvoir et tout devenait permis du moment qu’une loi ou un décret l’autorisait… une telle situation est mère de tous les totalitarismes...».

 

Sur l’idéologie

 

L’idéologie est une croyance mensongère autour d’une narration qui ne correspond pas à la réalité de l’expérience. Et plus on avance dans le fait totalitaire, plus cette idéologie va s’éloigner de l’expérience réelle et va exiger que les gens adhèrent à cette idéologie, jusqu’à nier non seulement l’expérience de la réalité mais aussi à faire en sorte que l’expérience corresponde à l’idéologie. En clair, si on a désigné une catégorie de population comme parias, on va faire en sorte que cette catégorie de population devienne vraiment une population de parias, considérés comme dangereux sur un plan de l’hygiène ou sur un plan économique ou autre. L’idéologie ne va pas se plier  à la réalité  mais lui substitue un mensonge, en général situé sur quelque chose que l’on n’a pas le droit d’interroger.

 

Par exemple qui a défini que le confinement était bien, sur quelle base d’information, etc. ? Ce confinement n’est pas interrogeable ! C’est un interdit de penser. A partir de là se déroule l’idéologie, tout le temps en mouvement pour maintenir une certaine tension psychologique chez les gens. Par exemple : les « variants », en constante évolution. Pour empêcher de figer l’idéologie de telle sorte qu’on ne puisse pas l’interroger. On est tout le temps pris dans ce mouvement perpétuel qui est la condition du maintien du pouvoir.

 

Il faut se trouver (s’inventer) des ennemis

 

La pathologie, c’est le déni de réalité avec en plus le fait de recréer un discours délirant qui ne correspond pas à la réalité. Ce discours peut avoir plusieurs visages. Considérer un virus comme un ennemi est déjà en soi problématique. Il faut savoir que cette pathologie collective du totalitarisme relève de la psychose paranoïaque et la paranoïa est contagieuse entre individus et peut l’être entre les groupes, les états, on a vu dans l’histoire où ça nous mène. Cette psychose collective désigne toujours un ennemi. Et cet ennemi va évoluer. Par exemple pour maintenir les cerveaux en haleine on est passé d’un virus ennemi à des personnes ennemies, les non vaccinés sont devenus ennemis. Demain ce sera encore autre chose.

 

Nous sommes également dans une période poly-idéologique : il y a plusieurs sortes d’ennemis. Le sanitaire a pris le devant de la scène mais d’autres ennemis sont désignés. Dans l’idéologie il y a toujours un idéal qui fait consensus mais ce sont les moyens pour y  arriver  qui ne font pas consensus. Rien ne justifie qu’on sacrifie le collectif. Or le totalitarisme considère que les individus ne sont pas des êtres à part entière.

 

Or en réalité  il n’y a pas deux individus semblables, nous sommes tous différents, même les jumeaux sont différents. C’est dans le respect de cette diversité, de cette richesse que réside l’humanité. Et le totalitarisme fait la proposition inverse que nous sommes tous identiques et nous devons être traités de manière identique, cela au prix d’une grande injustice : les enfants sont mis au même plan que les adultes, les handicapés  au même plans que les non handicapés, etc.

 

Sur le harcèlement

 

Pour mettre en place le totalitarisme la méthode utilisée est le harcèlement. Le harcèlement est l’outil et le chef d’œuvre de la paranoïa. Cela nécessite le concours de différents profils psychologiques. Notamment les pervers sont complètement autorisés à agir dans le contexte totalitaire et à assouvir leurs pulsions de domination, de contrôle, de sadisme et de cruauté.

 

Dans le peuple un mécanisme peut s’activer et le faire participer de façon complice. Nous avons les dirigeants que nous méritons ou  que nous permettons. Une grande part de la population française s’est accommodé des mesures restrictives de liberté. L’ennemi justifie l’entrée en guerre. Si l’ennemi est d’abord invisible c’est encore mieux. Puis il évolue.

 

Comment cette pathologie est-elle contagieuse ?

 

Il y a d’abord une mise sous terreur du collectif puis ce collectif va être mis sous des chocs traumatiques réitérés c’est-à-dire des menaces répétées à l’intégrité de soi ou d’autrui. De façon à sidérer les gens. Ensuite il faut des passages à l’acte  c’est-à-dire on va agir sur la vie concrète des gens de telle sorte qu’ils perdent leurs repères. A partir de là on a crée une effraction psychique  c’est-à-dire une sorte de cambriolage de notre vie intime et psychique. Et les réactions ne vont pas être les mêmes selon les individus.

 

Sur le harcèlement et la nouvelle langue

 

Comme c’est très violent la menace à l’intégrité va être mise en scène puis attribuée à autre chose, on va désigner un coupable et en même temps dans le discours des éléments paradoxaux vont apparaître dans le harcèlement, par exemple dire une chose et faire l’inverse, dire une chose puis dire  l’inverse quelque temps après. Il y a quelque chose qui ne s’inscrit plus du point de vue de la vérité et de la logique, ce qui perd les gens dans le langage. Comme c’est une folie une nouvelle langue se met en place, cela fait partie de la psychose paranoïaque. Apparaissent des néologismes, des nouveaux mots non définis qui peuvent dire quelque chose et son contraire et dans lesquels chacun peut y mettre ce qu’il veut. Accepter cette nouvelle langue fait entrer dans cette représentation délirante et mensongère du réel. Tout ce contexte va fragiliser les personnes sur le plan psychique et émotionnel. Par la terreur et l’empathie, ces émotions activées vont faire accepter cette nouvelle langue.

 

Pour les individus cette effraction traumatique, ces chocs, entraînent de facto et sans intervention de la volonté, des mécanismes de défense. C’est-à-dire que les individus vont mettre en place des outils pour réussir à gérer la violence de la situation de laquelle ils ne peuvent pas sortir parce que  pris en otage. Dans une situation violente qui dure et dans laquelle, brassés du point de vue émotionnel et logique, ils ne comprennent plus rien, alors  ils mettent en place des boucliers, des armures.

 

Le déni et la banalisation, mécanismes de défense

 

L’un des boucliers les plus puissants est le déni : la réalité, la violence de ces chocs traumatiques n’existent pas. Donc un deuxième mécanisme, l’oubli s’installe. Je peux donc me remettre dans la même situation et aller revoter pour le même personnage politique qui n’a pas cessé de mentir à la population et malgré les preuves de ses mensonges. C’est l’amnésie traumatique. Elle peut être partielle ou totale.

 

L’autre mécanisme de défense est la banalisation : ce n’est pas si grave ! Cette fermeture n’est pas volontaire chez les personnes. Si elles voyaient la violence de ce qui se passe et l’intention de nuire présente de la part de ceux qui mettent en scène cette situation, ce serait tellement insupportable pour elles qu’elles se désintégreraient probablement sur le plan psychologique, soit dans une dépression avec éventuel passage à l’acte suicidaire, soit en sombrant dans une folie. C’est donc une sorte de protection. Faire l’autruche, ne pas voir, ne pas savoir est une protection de survie psychique.

 

La psychose paranoïaque

 

Dans la psychose paranoïaque il y a un noyau mélancolique qui relève de la question du deuil, de la perte, de la représentation de la mort. Ce noyau mélancolique est rejeté, impossible à être accepté. Dans la  psychose paranoïaque il y a parfois des délires d’immortalité, un déni de sa propre mort et de sa propre naissance, un déni de l’avant, de l’après, une temporalité spécifique et cyclique qui ne fonctionne plus. Par exemple depuis un an et demi on tourne en rond.

 

Pour beaucoup la blessure va être difficile à réparer et fait s’effondrer le monde de la personne.

Par exemple, les personnes qui pensaient être dirigées par de gentils gouvernants peuvent voir s’effondrer leur sécurité et leur monde. Les chocs traumatiques du totalitarisme signifient  toujours une perte, la perte du monde d’avant en plus des pertes matérielles spécifiques (travail, etc.). D’ailleurs une nouvelle normalité nous est proposée. Et malgré des discours qui incitent à obéir pour revenir au monde d’avant, le monde d’avant n’existera plus. Cette idée peut être insupportable, cette conception de la perte peut être insoutenable pour certains. Alors il est plus confortable pour eux de rentrer dans cette séduction : « Si vous voulez revenir au monde d’avant, faites ceci ou cela, etc. »

 

Les personnes ni folles ni perverses, quand on les sort du harcèlement et de la nouvelle langue auxquels elles étaient exposées, reprennent leurs esprits.

 

Dans le harcèlement il y a la répétition et la durée des menaces sur l’intégrité.

 

Dans les harcèlements totalitaires (état ou entreprises) on voit les premiers ennemis désignés qui sont ceux qui s’opposent frontalement à l’équipe de harceleurs, ils sont vite mis sur la touche. Puis ce sont les amis de ces opposants, puis comme il faut des ennemis au régime totalitaire pour qu’il perdure, d’autres ennemis vont être recherchés. C’est bien décrit par  A. Soljenitsyne (1918-2008) qui explique que tout fonctionne à l’arbitraire.

 

Et ce qui accroît le désarroi c’est que ceux qui pensaient être les bons élèves seront un jour visés et pris dans des condamnations, des processus arbitraires. Ces naïfs qui se savent innocents, croient qu’ils  peuvent faire valoir leur innocence mais le régime totalitaire ne fonctionne pas au bien et au mal, ne fonctionne pas à l’innocent et au coupable. Tous deviennent coupables. Il n’y pas d’ancrage de vérité, le développement du psychisme n’est pas allé jusque là dans la psychose paranoïaque ou la perversion.

 

Le totalitarisme a besoin de persécuter

 

Le totalitarisme a besoin de persécuter pour se légitimer, il lui faut trouver des victimes à sa persécution. Et comme il a besoin de se maintenir par la terreur, il n’y a rien de tel que l’arbitraire. Ceux qui ont vécu et raconté les phénomènes totalitaires comme Koestler et d’autres montrent qu’il y a quelque chose qui relève de l’autodestruction.

 

Tout d’abord le harcèlement n’est pas là pour détruire, il est là pour conduire les victimes à l’autodestruction ; c’est la victime seule qui va s’autodétruire, c’est pourquoi il y a explosion des tentatives de suicides, prolongement logique du harcèlement lors des expériences totalitaires. Mais le pouvoir totalitaire a aussi une logique, celle de l’expansion ; pour survivre il doit s’étendre.

 

Citation d’Hannah.  Hannah Arendt (1906-1975), philosophe allemande et professeur de théorie politique, dit qu’une fois que les opposants officiels sont réduits au silence, c’est alors que la terreur devient plus grande et va frapper l’ensemble des citoyens de façon arbitraire.

Il est illusoire de se croire à l’abri parce qu’on a été le bon élève docile. Les plus loyaux au système totalitaire finissent par être désignés aussi comme ennemis, l’histoire le montre. Exemple la garde rapprochée de Staline.

 

Le régime totalitaire ampute les cellules qu’il estime malades et nous sommes tous considérés comme des cellules interchangeables par ce type de régime. Mais comme le malaise n’est jamais résolu pour les psychotiques, c’est tout le corps entier, constitué des cellules, qui va être persécuté. Donc tous vont être persécutés.

 

La peur de la mort et la perte de la spiritualité

 

La psychose paranoïaque propose une transgression. Le message donné par le régime  totalitaire est qu’il va nous prendre en charge dans tous les plans de notre vie, de A à Z. Mais nous ne sommes pas des enfants d’une part et, d’autre part, ce régime n’est pas bienveillant. Cette proposition vise à nous faire régresser vers un état larvaire, et toute manifestation d’inconfort est considérée comme menaçante.

 

Cette idée de régression a séduit beaucoup de monde car c’est difficile de vivre, d’affronter la souffrance de l’existence, d’être responsable, d’être cohérent, de répondre de ses actes, etc. et devant les difficultés c’est tentant d’accepter cette prise en charge. Ce qui nous permet d’être responsables, c’est tout ce qui va s’organiser autour de l’autorité. Il faut savoir que le régime totalitaire est autoritaire mais ne fait pas preuve d’autorité du tout, c’est l’inverse. Il ne faut pas confondre autorité et autoritarisme.

 

Et qui fait autorité c’est ce qui va nous poser de façon verticale et non pas horizontalement comme tous collés dans une sorte d’utérus. La verticalité s’acquière dans l’éducation au long d’un long processus et notamment par un passage du fameux complexe d’Oedipe souvent incompris.

 

Les quatre piliers de la verticalité

 

Il faut mettre 4 piliers à la maison pour une fondation verticale solide :

 

► l’interdit du meurtre

► l’interdit de l’inceste

► la différence des générations

► la différence des sexes

 

Ces 4 piliers vont se construire dans le psychisme de l’enfant peu à peu et ce sont 4 castrations fondamentales qui permettent de vivre ensemble.

 

L’interdit du meurtre c’est aussi ne pas réduire l’autre à l’état de paria ou le calomnier, sorte de meurtre symbolique psychique, sociale, symbolique.

 

L’interdit de l’inceste, on ne touche pas aux enfants en général. Les enfants sont fragiles et notre avenir. Le trauma le plus violent est celui sexuel sur des êtres fragiles en construction.

 

La différence des générations est fondamentale, elle signifie qu’il y a un avant et un après. La psychose paranoïaque fait table rase de ce qu’il y avait avant et il y a volonté d’être créateur de tout. Dans tout totalitarisme il y a effacement de la culture, de tout ce qu’il y avait avant et qui permettrait de voir que ce nouveau pouvoir n’est pas légitime. Cette différence des générations est l’inscription de l’autorité. Nous avons des ancêtres qui ont œuvré et nous ont cédé un monde en héritage dont nous sommes débiteurs, que nous devons transmettre à nos enfants à minima à l’identique ou amélioré si possible. Dans la psychose il y a  perte de cette temporalité et de la notion de mortalité, de destin, d’héritage, etc.

 

La différence des sexes est refusée dans la psychose paranoïaque : on est homme / femme, père / mère, tout à la fois. Tout est confondu. Tout est nié de la différence. L’altérité est niée.

 

Ces 4 phases de développement sont fondamentales pour arriver au stade de développement logique : faire la différence entre le vrai et le faux, parvenir au principe de non-contradiction. On ne peut pas dire une chose et son contraire à la fois. Ce  principe de non-contradiction permet l’ancrage du discernement entre le bien et le mal, donc de la capacité morale.

 

Le sens de l’autorité

 

L’autorité c’est ce qui nous permet de sortir de la confusion, de séparer les choses, de les discriminer au sens étymologique du terme, pour les mettre à leur juste place. Si cela n’est pas fait on est dans la maltraitance. L’égalité ce n’est pas le même traitement pour tous, les corps et les vécus sont différents. Une réponse monolithique n’est pas adaptée pour des individus différents. A chacun selon ses besoins (égalité géométrique et non arithmétique).

 

Notre société incohérente hurle contre les discriminations mais  n’accepte pas les différences, elle est donc est injuste. Harceler c’est couper les têtes qui dépassent. L’autorité c’est transcendant par nature, c’est ce qui donne sa légitimité au pouvoir et ne s’exerce pas dans la contrainte. C’est nous qui allons donner du crédit à une figure et lui donner l’autorité qui va légitimer son pouvoir

Si la figure n’a pas cette autorité elle va devoir exercer son pouvoir dans la contrainte.

 

Cette  légitimation se fait de façon transcendante, c’est l’idée du maître et de l’élève qui ne sont pas au même niveau parce que le maître détient un savoir, qu’il va transmettre à l’élève. Si on les met au même niveau, c’est que le savoir n’a plus aucune valeur. La question de la transmission et du rapport aux ancêtres fait partie de la question de l’autorité. La question de la transcendance spirituelle en fait partie aussi. Nous sommes des êtres finis par rapport à un infini qui peut être l’idée de Dieu et toute la dimension transcendante. Tout cela est contenu dans la question de l’autorité. L’autorité  permet de faire contrepoids.

 

La question de la narration délirante

 

Les gens qui n’entrent pas dans la narration délirante ont des points communs :

 

►1- Un ancrage indéfectible à la question de la vérité. La vérité a du sens, elle n’est pas relative. La vérité logique ne peut pas contredire l’expérience (sinon logique folle, folie raisonnante). Le bon sens est fondamental. (La réalité actuelle est ignorée ou niée : souffrance, misère, violence, enfants sans instruction, etc.)

 

►2- Une spiritualité forte personnelle. Ou un ancrage par rapport à leurs ancêtres ; ils ont eu des figures qui ont servi et servent encore de modèles pour leurs actions. Ils savent que nous devons répondre de nos actes et de nos paroles vis-à-vis de nos enfants et de nos ascendants également en ne les décevant pas par rapport à leurs luttes pour nos droits humains.

 

Le discours de l’immédiateté des médias actuels se rencontre dans le totalitarisme et aussi dans les pseudo-spiritualités

 

La psychose – diviser pour régner

 

Dans la psychose il y a clivage : l’individu ou le groupe va se scinder en deux. Cette rupture va être irrémédiable, les gens ne vont plus pouvoir s’entendre ou se réconcilier. On le voit actuellement dans les familles, entre amis, dans les milieux professionnels. Un pouvoir qui divise pour régner est malsain et dangereux. La suite logique des clans pourrait être l’affrontement de ces clans qui se renvoient  mutuellement la responsabilité de la souffrance dans laquelle tout le monde est. C’est le but de la division pour régner, pour que l’on ne recherche pas l’auteur de la division.

 

Le fait de désigner une partie comme ennemi à l’autre partie est mis en scène par le pouvoir paranoïaque dont la méfiance est une caractéristique. La méfiance de tous contre tous est un venin qui s’immisce dans le corps social et qui sert le pouvoir totalitaire.

 

Résistance intérieure et recul

 

La résistance intérieure et le recul sont nécessaires pour ne pas sombrer dans le délire ou la violence et anticiper la reconstruction à partir de nos racines et de notre culture. Comment faire et résister à la déshumanisation ? Le clivage va entraîner des phénomènes de radicalité inévitables. Nous ne pouvons pas arrêter un totalitarisme en marche. Il y a une chronologie qui va vers la guerre ou l’autodestruction. Il faut s’y préparer. Seul on ne peut pas sauver l’humanité mais c’est illusoire d’attendre que les autres comprennent et se mettent au diapason. Il faut donc d’abord se mettre en chemin tout seul.

 

Contre la violence du discours politique : garder ses distances et la tête froide

 

Si on a affaire à une folie, la priorité est de ne pas entrer dans cette folie. Vu la violence de ce qui est perfusé au niveau du politique et qui a fonctionné, assimilé par une grande partie de la société civile c’est déjà un exploit de ne pas se laisser entraîner dans la violence ou dans une forme d’autre type de délire (comme par exemple qu’il suffit de penser très fort que tout va bien aller et que tout va redevenir comme avant).

 

Il faut garder une certaine distance. La puissance de cette violence et le fait qu’elle contamine beaucoup va entraîner une solitude qu’il faut accepter. Garder la tête froide et ressentir ce qui est bon pour soi, trier les infos, s’armer sur le plan intérieur pour ne pas basculer dans la violence, la dépression ou une autre idéologie. Garder de la mesure, de la tempérance et de l’équilibre au quotidien est très important (politique de petits pas). Chacun doit définir ses propres stratégies pour ne pas aller trop mal malgré tout.

 

Comment s’en sortir

 

Ce peut être se rencontrer avec les personnes avec qui on partage la même vision du monde, ce peut être se ressourcer dans des livres qui font du bien, dans la philosophie par exemple, etc. pour la partie intérieure. Rester dans une certaine sérénité tout en étant lucide et ne pas se laisser trop intoxiquer. De façon plus concrète il y a mille et une façons de résister au fait totalitaire. Il faut être le grain de sable qui enraye le mécanisme. Le totalitarisme ne supporte pas que nous soyons des individus à part entière. Dans toutes les périodes noires de l’humanité il y a toujours eu un petit groupe qui tentait de sauvegarder l’histoire, les œuvres, la connaissance du monde d’avant, du monde du vivant, la culture. Nous devons sauvegarder tout ce qui peut servir de contrepoids au totalitarisme. Il est fort probable, dans le contexte actuel, que, sous prétexte d’être écrites par des blancs, des œuvres seront détruites. Nous sommes poussés dans nos retranchements : qu’est ce qui est important pour moi, qu’est ce qui définit un être humain pour moi, etc. ?

 

Socrate n’a pas accepté l’arbitraire et bien d’autres figures peuvent nous parler, se les remémorer.

Se remémorer l’esclavage, car on nous y mène… Trouver sa structure d’être et s’organiser en fonction de ça.

 

Résister c’est aussi comprendre que les traîtres sont déjà là

 

La résistance unie est une illusion. Le pouvoir vicieux, malsain infiltre l’opposition qu’il crée. Des traîtres sont déjà là. Ne pas suivre nécessairement ceux qui se présentent comme leaders. Exemple Jean Moulin a été trahi par des résistants de la résistance unie.

 

J’ai l’impression que la perspective de Guillemant[2] (un futur lumineux après la transition actuelle) est très gentille, c’est un  espoir donné à des gens qui peuvent en avoir besoin.

 

Mais voilà mon interrogation. Nous sommes dans un chaos où la nature peut aussi s’en mêler.

Quelle en sera l’issue ? Deux possibilités : quelque chose de nouveau et de mieux avec remise au centre de valeurs fondamentales ou bien autodestruction totale car nous sommes arrivés à un stade d’évolution de l’humanité où il n’y aura pas d’issue, du moins au sens de l’être humain considéré comme un être sacré et charitable.

 


 J’ai l’impression qu’on va vers une autodestruction radicale dont on ne se relèvera pas. Je suis plus mélancolique que Ph. Guillemant certainement. Je partage davantage la vision de G. Anders, philosophe allemand qui disait qu’il est urgent que l’humanité comprenne qu’elle est en capacité maintenant de s’autodétruire. Nous n’avons pas encore mesuré jusqu’où nous sommes allés et nous allons vers bien pire.

 

Fonder la résistance

 

Le fondement de la résistance  c’est soit l’espoir, soit le devoir. Je crains que l’espoir affaiblisse notre sens des responsabilités. Même si ça ne sert à rien, il faut le faire tout de même.

 

Je suis affolée que nous ne soyons pas tous affolés par ce qui se passe.



[1] Edward Bernays né à Vienne ; ces parents émigrent aux Etatd-Unis, l’année suivante. C’est un publiciste austro-américain. Il est considéré comme le père de la propagande politique et d’entreprise, ainsi que de l’industrie des relations publiques, qui ont fortement contribué à développer le consumérisme américain. Il est neveu de Freud.

[2] Voir dans ce même blog : article 59.Une lecture pour le  temps présent - Philippe Guillemant (résumé et présenttion d’ouvrage) et 62.De la crise sanitaire à une nouvelle monnaie - Philippe Guillemant (transcription et présentation de conférence)

 

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