13 septembre 2022

115. Pour une morale de la liberté - Rudolf Steiner

 

Trois aspects essentiels de la notion philosophique de la liberté

 


 

1 - Connaissance de soi et conception de l’univers

2 - Morale de l’autorité et morale de la liberté

3 - Déshumanisation et asservissement

 

 

 


 

Ce que nous vivons depuis trois ans (certes, depuis bien plus longtemps que cela, mais c’est beaucoup plus visible et perceptible depuis mars 2020) en ce qui concerne la liberté et les libertés tant individuelles que collectives des individus, n’est pas forcément inédit, mais c’est très grave.

 

Dans la société occidentale actuelle de plus en plus contrôlée (et contrôlant les individus), dans cette société dont une majorité d’individus semblent exiger plus de sécurité que de liberté et qui acceptent passivement la perte de libertés fondamentales au nom d’une illusoire sécurité sanitaire, il m’apparaît précieux de faire le point sur la notion de liberté qui implique de savoir pour qui et pourquoi ?

 

Les libertés et la liberté n’appartiennent pas au même plan de compréhension mais sont interdépendantes.

 

On s’en tiendra, ci-dessous à la notion abstraite de liberté à l’aide du chapitre IX d’une œuvre philosophique à part, datant de la fin du XIXe : « La philosophie de la Liberté » de Rudolf Steiner, Editions Anthroposophiques Romandes, 1983. Et dans cet ouvrage, c’est dans le Chapitre IX – L’Idée de la liberté que l’on trouve les idées maîtresses développées ci-dessous.

 

Y sont décrites d’abord les phases de l’acte de connaissance pour  montrer que le penser est perfectible comme toute autre faculté et ensuite indiquer comment l’expérience vécue et exercée de la pensée conduite selon la méthode scientifique conduit aussi à la réalité de la liberté, mais une liberté à conquérir.

 

 

1- Connaissance de soi et conception de l’univers

 

Le « connais-toi... » de l’Antiquité est toujours d’actualité. Mais il ne renvoie pas seulement à une connaissance de sa propre personnalité comme le prône le « développement personnel » à la mode. Il fait surtout allusion à une connaissance profonde du potentiel humain, de la nature humaine universelle, une connaissance de l’homme sur tous ses plans : physique, énergétique, animique et spirituel. Ce qui mène également à une conception de l’univers non matérialiste.

 

Sur ce chemin de connaissance de l’entité humaine et de son destin évolutif, il y eu de tous temps, à toutes les époques des initiés, des investigateurs spirituels pour aider les hommes à y voir plus clair et plus loin que ce qui est visible car « il se passe plus de choses sur terre et dans les cieux... » que ce que nos sens peuvent en percevoir.

 

L’entité humaine est par nature morale, sociable et appelée à évoluer encore pendant de longues périodes nous enseigne cet initié occidental qu’est Steiner. De formation scientifique à l’Ecole Polytechnique de Vienne, il obtient ensuite un doctorat de philosophie, investigateur spirituel il a décrit dans son œuvre sa méthode d’éducation de sa pensée pour parvenir à ses connaissances spirituelles.

 

Il considère que l’homme évolué est un esprit libre dont la maxime fondamentale devrait être : « Vivre par amour de l’action, et laisser vivre les autres en étant compréhensif pour leur vouloir »

 

Pour Steiner « l’esprit libre est la suprême expression de la nature humaine.» et liberté et moralité sont indissociables

 

2 - Morale de l’autorité et morale de la liberté

 

Nos sociétés occidentales évoluent depuis des siècles dans le cadre d’une morale chrétienne qui fixe par ses commandements comment nous devons nous comporter les uns envers les autres. Puis les lois des États complètent les règles auxquelles nous devons obéir pour une vie en société sereine et féconde sur le plan pratique.

 

Commandements religieux, lois civiles, règles diverses indispensables jusqu’à présent dans la vie civilisée signifient-ils que l’homme est dans l’absolue incapacité de se comporter à la fois moralement et librement ?

 

D’autre part le débat entre déterminisme et liberté n’est toujours pas clos. Sommes-nous toujours déterminés par notre constitution physique et psychique ?

 

Voici ce qu’en pense le philosophe auteur de La Philosophie de la liberté

 

« L’homme est libre dans la mesure où il est capable de n’obéir qu’à lui-même…

L’acte libre n’exclut pas les lois morales ; au contraire il les inclut. Par contre il s’avère supérieur à l’acte simplement dicté par ces lois…

 

Le principe du devoir pur élimine la liberté, parce qu’il renie le facteur individuel et exige la soumission à la norme générale. L’acte libre ne se conçoit que du point de vue de l’individualisme éthique…

 

Seul l’homme qui n’est pas libre moralement, enchaîné par l’instinct naturel ou l’impératif d’un devoir accepté, repousse son voisin qui n’obéirait pas au même instinct ou à la même loi.

 

L’esprit libre triomphe des normes en ce sens qu’il puise ses motifs d’action non seulement dans les commandements, mais également dans ses propres intuitions morales.

 

La morale de la liberté ne prétend pas que l’esprit libre soit la seule forme sous laquelle l’être humain puisse exister….Notre vie se compose d’actions libres et d’actions non libres. Le concept d’« être humain » n’aura pas été pensé jusqu’au bout, tant qu’on n’aura pas découvert que l’esprit libre est la suprême expression de la nature humaine. Nous ne sommes véritablement hommes que dans la mesure où nous sommes libres.»

 

Les actions déterminées par notre constitution corporelle et psychique, réalisées pour satisfaire des besoins, envies ou désirs personnels, ne sont pas libres. Mais il existe des situations dans lesquelles les individus sont capables d’agir par idéal, par conviction politique ou morale; ils accomplissent alors  des actes qui ne leur rapportent aucun bénéfice personnel et qui, au contraire, représentent souvent un coût pour eux. C’est pour ce type d’actions qu’il est possible de parler de liberté.

 

Un exemple simple: celui qui prend en charge la responsabilité ou le bien-être d’un autre être, humain ou animal, sans qu’aucune règle, loi, convention sociale ne l’y oblige ou même ne l’y encourage et le fait en toute indépendance et discrétion, accomplit un acte libre.  Actuellement les actes de désobéissances civiles face à des gouvernements corrompus et des lois injustes sont des actes libres. Les exemples de sacrifice pour un idéal qui jalonnent l’histoire sont des actes libres d’une autre valeur spirituelle.

 

R. Steiner n’est pas aveugle et admet que pour la plupart des hommes il est encore nécessaire d’imposer des commandements moraux pour qu’ils s’abstiennent de suivre leurs penchants. Il admet que cette conception de l’homme libre n’est pas réalisée au niveau de l’ensemble de l’humanité et peut paraître chimérique au stade actuel d’évolution de l’humanité.

 


Mais si la non-liberté, dans la nature de l’être humain, est « notre ultime conviction, alors renonçons à tout simulacre de moralité et disons clairement : tant que la nature humaine n’est pas libre, il faut la forcer à agir...par des moyens physiques ou des lois morales pour triompher de la non-liberté...qu’il soit esclave de son instinct sexuel ou enchaîné par une morale conventionnelle… »

 

Pour Steiner la véritable moralité est donc celle de l’esprit libre. La moralité contrainte de l’esclave des conventions  est une sous-morale sur le plan spirituel.

 

Et la liberté d’esprit existe mais elle est à conquérir par une volonté de métamorphose.

Il faut admettre que de tous temps « du sein de l’ordre imposé émergent des esprits libres, des hommes qui ont su se trouver eux-mêmes dans cette confusion de mœurs , de lois, de pratiques religieuses, etc. Ils sont libres dans la mesure où ils n’obéissent qu’à eux-mêmes… »

 

Il poursuit : « Si l’homme n’était qu’une créature naturelle, la recherche d’un idéal …serait une absurdité… »

 

Devenir un esprit libre exige des efforts d’éducation de sa pensée : « Le concept d’homme moral n’est pas relié à priori et objectivement à l’image de perception « homme »...C’est l’homme lui-même qui doit relier son propre concept avec la perception « homme »...Pour y parvenir il doit préalablement avoir élaboré le concept d’esprit libre, c’est-à-dire son propre concept. L’homme a la possibilité de se métamorphoser...La nature  se contente de faire de l’homme une créature naturelle ; la société fait de lui un être agissant conformément aux lois ; lui seul peut se transformer en être libre...L’homme seul peut parachever son évolution...Cette spiritualité libre est l’ultime degré de l’évolution humaine.

 

 

Les normes, les commandements et les conventions morales sont justifiées mais elles ne représentent qu’une étape, en attendant que l’homme soit suffisamment évolué  et il ne s’agit pas de les admettre « comme l’absolu du point de vue moral. »

 

L’homme conscient de la liberté de l’esprit, décrit par Steiner, est un être évolué supérieur sur le plan moral ou spirituel à l’homme de devoir prôné par Kant. En prélude à « La Philosophie de la Liberté » Steiner a publié en 1892 « Vérité et Sciences », une analyse critique de la construction spéculative de Kant.

 

3 - Déshumanisation et asservissement

 

Depuis 2020 n’assistons-nous pas dans le monde occidental, sous prétexte de ‘pandémie’, à une tentative accrue d’isoler les individus les uns des autres sur le plan physique et sur le plan psychique ? Que peut signifier l’accroissement de la déculturation, de la désinformation, de l’isolement des individus par des mesures de confinement et de distanciation sociale, la perte de liberté d’expression, les techniques de diminution de la conscience, etc. sinon la volonté de déshumaniser progressivement les individus pour les soumettre ? 

 

 

« Si le germe de la sociabilité n’était pas depuis l’origine implanté dans la nature humaine, aucune loi extérieure ne pourrait le lui fournir. Les individus parviennent à vivre côte à côte pour la simple raison qu’ils participent à un seul et même esprit. L’homme libre vit dans la confiance que les autres êtres libres appartiennent comme lui au même monde spirituel. Libre, il n’exige jamais l’approbation des autres ; mais il l’attend, parce qu’elle est inhérente à la nature humaine...Toute collision entre les hommes moralement libres est impossible…

 

L’esprit libre n’éprouve pas …. le besoin de transgresser les lois de son pays...Toutes les lois objectives de la moralité ont été inspirées par les intuitions d’esprits libres… conçues de manière intuitives par un ancêtre... Les conventions morales furent à l’origine fixées par des hommes. Il en est de même pour les lois de l’État, toujours conçues par des hommes d’État... Les hommes n’en sont esclaves que s’ils oublient cette origine... Par contre, au lieu de négliger cette origine, on peut y chercher la marque de l’homme; alors les lois se révèlent comme étant une part de ce même monde idéel d’où nous puisons nos intuitions morales… »

 

Steiner conteste l’idée religieuse de l’homme « qui serait sur terre pour réaliser un ordre moral universel conçu en dehors de lui.» Pour lui : « L’homme libre se conduit moralement parce qu’il possède une idée morale, et non point pour que la moralité existe. L’homme n’est pas fait pour la morale mais la moralité existe grâce à l’homme.»

 

Il constate donc que le postulat de finalité dont la science a réussi à se débarrasser encombre encore souvent l’éthique. Il conseille donc de ne pas inverser l’ordre des phénomènes : « L’individualité humaine est la source de toute moralité… L’État, la société ne sont que la conséquence nécessaire de l’existence individuelle...l’inaction les atrophieraient. L’individu lui aussi s’atrophierait, s’il menait une vie isolée, hors de toute collectivité humaine

 

La déshumanisation vise à faire obstacle à l’évolution vers une plus grande liberté d’esprit des individus La déshumanisation vise à asservir les individus à un ordre artificiellement créé par des esprits pervers. Un ordre qui n’est plus un ordre social fonctionnant avec des lois conçues par des esprits libres. Les nouvelles lois étant de plus en plus des lois scélérates non favorables à une évolution saine des hommes et de la société.

 

Par exemple, la nouvelle loi bioéthique, votée l’été 2020 en fin de nuit par quelques députés encore présents, autorise la création de chimères, êtres hybrides mi-humains mi-animaux et « l’avortement » à 9 mois.

 

Depuis plus de deux siècles une philosophie matérialiste prédomine, limitant la connaissance et bornant l’univers au monde sensible. Ce choix philosophique qui apporte une conception de l’univers étriquée limite beaucoup  d’esprits contemporains et nous arrivons maintenant vers les ultimes conséquences de ce matérialisme devenue religion à travers ce nouvel ordre mondial qui s’implante et prévoit un avenir transhumaniste pour l’homme. Un avenir pour une petite  partie de l’humanité « augmentée » technologiquement et servie par des esclaves diminués en conscience.

 

L’homme « augmenté » étant le credo du nouvel ordre mondial et la perte de conscience étant la réalité actuelle de milliers de gens dans le déni et l’incapacité de prendre conscience de ce qui se passe réellement, en ce moment de tyrannie sanitaire et d’expérimentation médicale dans laquelle, par millions, ils sont pris pour cobayes pour un projet qui ne leur est pas avoué.

 

C’est pourquoi la recherche de connaissance et la volonté de se développer en conscience sont aussi des outils de résistance à la gouvernance mondiale destinée à détruire l’humanité des hommes et leur pouvoir de civilisation.

 


 

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